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Les innocents de Vingré

Anonyme

1921 -

Sur l'air de "Mère et Maman"

Le 27 novembre 1914, après une préparation d'artillerie qui démolit une partie de leur tranchée, les soldats du 298e RI furent surpris par une attaque allemande qui fit plusieurs prisonniers. Une demi-section française dut alors se replier dans les boyaux. Le bombardement terminé, elle retourna dans la tranchée conquise par les Allemands et les en délogea, reprenant le contrôle de son emplacement. Mais à l'issue de cette escarmouche, une dizaine de soldats du 298e étaient restés prisonniers de l'ennemi. Les deux escouades (24 hommes) qui avaient momentanément abandonné leur tranchée furent alors prévenues d'abandon de poste en présence de l'ennemi. Lors de l'enquête sommaire, les soldats indiquèrent avoir reculé sur ordre du sous-lieutenant Paulaud, et s'être repliés dans une tranchée à l'arrière de la tranchée où l'attaque allemande s'était déroulée. Le sous-lieutenant Paulaud soutient ne pas avoir donné cet ordre de repli, au contraire il accable les 24 soldats. Le 3 décembre, le conseil de guerre spécial du 298e RI, à l'issue d'un tirage au sort désigne six d'entre eux qui sont fusillés pour l'exemple le 4 décembre 1914, suivant les directives données à ce conseil par le général Étienne de Villaret pour aider les combattants à retrouver le goût de l'obéissance.

En février 1919, les veuves des soldats Blanchard et Durantet entreprirent les premières démarches pour la réhabilitation de leurs conjoints en écrivant au docteur Laurent, député de Roanne. Mais c'est avant tout la détermination et l'acharnement de Claudius Lafloque, un ancien du 298e RI, qui permit de faire avancer la requête (échange de correspondances avec le ministère de la Justice, obtention de nombreux témoignages mettant en accusation directe le sous-lieutenant Paulaud, etc.).

Avec l'aide d'un avocat, le ministère, mis sous pression, finit par accepter la révision du procès. L'audience devant la Cour de Cassation eut lieu les 30 novembre et 1er décembre 1920 et le verdict fut rendu le 29 janvier 1921. Il cassait le jugement du 4 décembre 1914, et rétablissait les familles des fusillés dans leur plein droit y compris pour le paiement des pensions depuis 1914.



C'était six gars contents de vivre
Qu'avaient du prendre le flingot
Pour que la France puisse vivre
Ils firent la chasse aux Corbeaux
Mais dans la tranchée
Pas trop exposée
Un ordre leur vint : Ne restez pas là ! 
Et sans plus rien dire
Vite ils obéirent
Car les petits gars étaient de bons soldats
Mais l'ordre donné fut désapprouvé
Et d'abandon d'poste ils furent accusés

Au front : Justice est bientôt faite
Le Conseil de Guerre est constitué
La trahison semble parfaite
Et la sentence est : Fusillés !
Personn' ne veut croire
A leur triste histoire
De l'ordre donné, trace on trouverait
Peur ou négligence
C'est trahir la France
Et tous au poteau, on les emmenait
Leurs femm's et leurs goss's n'osaient les pleurer
Rougissant d'porter un nom si taré

Soudain un grand coup de théâtre
Les fusillés sont innocents
Et dans un grand amphithéâtre
On le proclame solennell'ment
Et les pauvres veuves
En rob's noires neuves
Écoutent ces mots "Au nom de la nation !
Que justice se fasse
Que la tach' s'efface
C'est le jour de la réhabillitation"
Puis on leur vota une somme d'argent
MAis c'la n'efface pas la tache de sang

Refrain:
Quelle sinistre erreur, quelle chose atroce
D'avoir fusillé ainsi ces pauvr's gars
Faut il que vraiment les homm's soient féroces
Pour que l'idée d'mort ne les arrêt' pas !
Il est bien assez de peines sévères
Vous pouviez choisir parmi ell's, pourtant
Mais, par crainte d'une erreur judiciaire
Vous ne deviez pas fair' verser leur sang !
































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